Le 4 septembre 2022, le Chili votera pour approuver ou rejeter un nouveau texte de Constitution, préparé par la Convention constitutionnelle pendant un an. Initié grâce aux mobilisations massives lors de la révolte qui a éclaté en octobre 2019, le processus constituant chilien est un moment historique d'intérêt international.
Si les peuples du Chili l’approuvent, ce nouveau texte remplacera la Constitution imposée en 1980 par le gouvernement militaire et dictatorial d’Augusto Pinochet, Constitution qui a entériné le modèle néolibéral de réforme de l’Etat et de la société chilienne (privatisations des entreprises publiques et marchandisation de domaines entiers des activités sociales, réduction des droits sociaux fondamentaux...) et qui a favorisé la précarisation de la vie de la grande majorité de la population. Ce modèle sera ensuite étendu et reproduit dans une grande partie du monde en utilisant le Chili comme exemple et vitrine du néolibéralisme.
Après 40 ans de néolibéralisme, le Chili est l'un des pays les plus inégalitaires au monde, un pays où les droits humains et fondamentaux sont systématiquement niés ou violés par l'État, où l'exploitation brutale des territoires conduit au sacrifice de zones entières du pays, où l'endettement est une condition de survie quotidienne. Au cours de ces 40 années, nous avons suivi les diverses, constantes et importantes mobilisations sociales chiliennes, comme les luttes étudiantes, environnementales, indigènes et féministes, qui ont directement remis en cause ce système néolibéral, son régime de précarisation de la vie et de l'exploitation des territoires. Ces revendications pour plus de justice, plus d’égalité et plus de dignité ont inspiré des propositions de changements aujourd’hui transcrites dans le texte élaboré par la Convention constitutionnelle.
Ce processus constituant représente un moment historique car il montre les limites du système néolibéral et la recherche de nouvelles alternatives économiques et sociales. Il est particulièrement important à l'heure où, partout dans le monde, nous constatons que la crise du capitalisme se retourne une fois de plus contre les populations les plus démunies, alors que, au même moment, les crises écologiques remettent directement en question nos modèles de développement. Face à ces crises, le processus constituant chilien est un exemple de solution démocratique pour le monde entier, puisqu'il a été élaboré dans un processus participatif et paritaire et ouvre un horizon de profonde démocratisation sociale.
Parmi les avancées significatives que la nouvelle Constitution permettra, nous soulignons les droits sexuels et reproductifs, en particulier le droit de décider de l'interruption volontaire de grossesse ; le droit à une vie sans violence sexiste ; les progrès vers un système judiciaire tenant compte de la dimension de genre, d'une approche intersectionnelle et d’une approche fondée sur les droits humains ; la reconnaissance de la plurinationalité et de l'interculturalité ; la démocratie inclusive et paritaire ; les droits territoriaux et environnementaux, tels que la reconnaissance de l'eau comme un bien commun inappropriable et non échangeable ; les droits de la nature, tels que la protection de l'eau, des glaciers, de la biodiversité, des zones humides, des forêts natives et des sols ; la reconnaissance de la crise climatique et écologique que nous vivons et de la responsabilité de l'État en matière de prévention, et d'atténuation des risques associés ainsi que dans la prise de mesures d’adaptation; les droits sociaux fondamentaux rendus jusqu'à présent impossibles par une conception subsidiaire de l'État, comme le droit aux soins de santé avec un système public et solidaire ; le droit à une éducation publique, gratuite, laïque, de qualité, non sexiste, interculturelle et adaptée au territoire ; les droits au logement décent et adéquat, à la ville et au territoire ; le droit à la sécurité sociale par le biais d'un système public ; les droits du travail pour garantir des emplois décents ; la reconnaissance du travail domestique et du travail de soin ; les droits syndicaux pour les secteurs public et privé ; le droit de négociation collective et le droit de grève.
En ce moment historique, nous espérons que la nouvelle Constitution sera largement approuvée, afin de faire progresser des droits importants au Chili et d'inspirer des changements transformateurs dans de nombreuses régions du monde.
[Pour plus d'information sur le processus constituant chilien et la Campagne des Mouvements sociaux pour la nouvelle Constitution du Chili, une explication détaillée est disponible ici.]
Premières signatures:
Maristella Svampa, Chercheuse et écrivaine, CONICET, Argentine
Donna Haraway, Professeure et écrivaine, University of California at Santa Cruz, EE.UU.
Ana Fani Caros, Professeure titulaire, Universidade de São Paulo , Brésil
Thomas Piketty, Économiste, Directeur d'études à l'EHESS, Professeur à l'Ecole d'économie de Paris, France
Cinzia Arruzza, Professeure, New School NYC, EE.UU.
Arturo Escobar, Professeur émérite d'anthropologie, Universidad de Carolina del Norte, Chapel Hill, EE.UU.
Eve Chiapello, Sociologue, EHESS, France
Didier Fassin, Professeur à Institute for Advanced Study, Princeton, Directeur d'études à l'EHESS, Paris
Abdourahman Waberi, Écrivain, enseignant, George Washington University, France/Djibouti
Virginie Despentes, Écrivaine, France
Daniel Szyld, Professeur de mathématiques, Temple University, Philadelphie, EE.UU.
Françoise Combes, Astrophysienne et professeure, College de France, France
Édouard Louis, Écrivain, France
Deborah Danowski, Professeure universitaire et philosophe, PUC-Rio, Brésil
Alain Benoit, Directeur de recherche, Académie des Sciences, France
Verónica Gago, Professeure et chercheuse CONICET, Universidad de Buenos Aires et Universidad Nacional de San Martín, Argentine
Laurent Binet, Écrivain, France
Franck Gaudichaud, Historien, Universidad Toulouse Jean Jaurès, France
Carlo Rovelli, Physicien et philosophe, Centre de Physique Theorique de Luminy, France
Irene Bellier, Directrice de recherche - anthropologue, CNRS, France
Laura Huertas Millan, artiste plastique et cinéaste, Colombie et France
Carolina Cerda-Guzman , Maitresse de conférences en droit public, Université de Bordeaux, France
Yves Sintomer, Professeur d'université, Universidad paris 8, France
Elisabeth Lebovici, critique d'art, France
M. Encarnação Sposito, Professeure, Unesp - Universidade Estadual Paulista , Brésil
Nuria Benach, Professeure , Universitat de Barcelona, Espagne
Didier Eribon, philosophe, France
Eliseu S. Sposito, Professeur, Unesp - Universidade Estadual Paulista , Brésil
Meredith Root-Bernstein, Chercheuse en écologie, CNRS- Muséum National d'Histoire Naturelle,France
Rusten Hogness, Écrivain scientifique, EE.UU.
Camille Al Dabaghy, Enseignante-chercheuse en sciences politiques, Université Paris 8, France
Christian Benedetti, Acteur metteur en scène, directeur du ThéâtreStudio à Alfortville, France
Fernanda Padonesi Fonseca, Professeure, USP – Universidade de São Paulo , Brésil
Sébastien Velut, Professeur, Institut des Hautes Etudes de l'Amérique Latine, France
Geoffroy de Lagasnerie, philosophe, France
Cecilia Perez Winter, anthropologue et enseignante-chercheuse, CONICET/UBA, Argentine
Pierre Vanhove, Physicien et Directeur de recherche, IPhT et CEA, France
Loïc Blondiaux, Professeur, Département de Science politique de l'U. Paris 1 Panthéon-Sorbonne, France
Fanny Gallot, historienne
Florian Vörös, Enseignant-chercheur en sciences de l'information et de la communication, Université de Lille, France
Sophie Wahnich, directrice de recherche, CNRS, France
Samuel Hayat, Chercheur en science politique CNRS et Sciences Po, France
Fernanda Lira Goes, Chercheuse, Institute for Applied Economic Research, Brésil
Luis Lloredo Alix, Professeur de philosophie du droit, Universidad Autónoma de Madrid, Espagne
Florence Rochefort , Historienne, CNRS, France
Enrique Viale, Avocat spécialisé dans l'environnement, Asociación Argentina de Abogados Ambientalistas, Argentine
Haud Guéguen, Maitre de conférences en philosophie, CNAM, France
Pierre-Henri Gouyon, Professeur, Muséum National d'Histoire Naturelle de Paris, France
Juan Manuel Aragüés Estragués, Professeur, Universidad de Zaragoza, Espagne
Marta Inez Marquez, Professeur, USP – Universidade de São Paulo , Brésil
Pierre Sauvêtre, Maître de conférences en sociologie, Université de Paris Nanterre, France
Beatriz Nates, directrice du doctorat d’études territoriales, Universidad de Caldas, Colombie
Piotr Kuligowski, chercheur, Institut d'Histoire de l'Académie Polonaise des Sciences, Pologne
Gloria Alves, Professeur, USP – Universidade de São Paulo , Brésil
Rafael Colombo, Avocat spécialisé dans l'environnement, Asociación Argentina de Abogades Ambientalistas, Argentine
Claudia Aboac, Autrice, Mirá socioambiental, Argentine
Mathieu Bellahsen, Psychiatre, Institut La Teigne, France
Matilde Ciolli, PhD, Universidad de Milan, Italie
Renaud Lariagon, Postdoctorant, UNAM, Mexique
Pablo Bergel, Sociologue, Iniciativa Arcoiris de Ecología Política, Argentine
Réjane Sénac, Chercheuse en science politique, CNRS, Sciences Po, France
Gastón Chillier, Avocat, Asociación Argentina de Abogados/as Ambientalistas, Argentine
Madeleine Aktypi, Enseignante et doctorante, École Supérieure d'Art de Bordeaux et Université Grenoble Alpes, France
Vania Ramirez Leon, Médecin, Comision Nacional de Derechos Humanos Chile - Suecia, Suède
Zuleika Rivera, Responsable du programme LGBTI, International Institute on Race, Equality
and Human Rights, EE.UU.
Christian Alexander Paula Aguirre, Enseignant, Universidad Central del Ecuador, Équateur
Anne-Claire Defossez, Chercheure, sociologue, Institute for Advanced Study, USA
Alejandro Raiter, Professeur consultant, Universidad de Buenos Aires, Argentine
Julia Zullo, Enseignante, Universidad de Buenos Aires, Argentine
Daniel Pereira Andrade, Professeur de sociologie, FGV-SP, Brésil
Agustina D'Andrea, Enseignante, Universidad Nacional de José C. Paz, Argentine
Lidia Ruiz Cuevas, Coordinatrice exécutive, Tierraviva a los Pueblos Indígenas del Chaco, Paraguay
Wing Shing Tang, Chercheur indépendant, Hong Kong
Federico Chicchi, Professeur, Università di Bologna, Italie
Sixtine Van Outryve d'Ydewalle, Chercheuse, UCLouvain, Belgique
Roberto Gargarella, Chercheur, CONICET, Argentine
Valentin Schaepelynck, Maître de conférences, Université Paris 8, France
Michèle Sebastia, Comédienne, France
Gilles Martinet, géographe, Université Paris-Est Créteil, France
Cláudio Gonçalves Couto, Politologue, FGV EAESP, Brésil
Delphine Lacombe, sociologue
Stéphane Sauzedde, directeur, ESAAA, France
Riccardo Petrella, professeur émérite, Université Catholique de Louvain, Belgique
Déborah Cohen, enseignante et chercheuse, Université de Rouen, France
Michel Lallement, professeur, CNAM, France
Federico Chicchi, professeur, Università di Bologna, Italie